Prévu pour être le dix-septième épisode de la licence (et le troisième en 3D après les volets sur Nintendo 64), Castlevania : Resurrection sur Dreamcast ne verra finalement jamais le jour car il a été annulé en mars 2000 !
Annoncé à l’E3 1999 via un trailer visible ci-dessous, le jeu était développé par une équipe américaine de Konami (une première pour la franchise !) mais sa sortie a été plusieurs fois repoussée pour diverses raisons : si certains analystes évoquent le choix peu judicieux de la console 128-bits de Sega dont les ventes n’étaient pas fameuses (jusqu’à l’arrêt de sa production le 31 janvier 2001), d’autres mentionnent le manque de qualité du jeu selon les critères de la maison mère, tandis que l’existence d’une éventuelle rivalité entre Américains et Japonais (sinon une différente façon de travailler) fait encore fantasmer plus d’un. Toujours est-il qu’on ne sait encore que bien peu sur feu Resurrection, seul le directeur artistique Greg Orduyan s’est exprimé sur l’épisode après son annulation en laissant quelques images de son travail… Dans son interview pour le site américain Castlevania Dungeon, il explique que le développement aurait été déjà mis en hiatus avec ceux des autres projets de l’éditeur sur Dreamcast à l’annonce de la sortie japonaise de la Playstation 2, soit dès le Tokyo Game Show de septembre 1999 !
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L’unique trailer du jeu !
Conformément à l’esprit arcade de la console de Sega, Resurrection devait être un épisode en 3D orienté action et non pas reprendre le modèle de Symphony of the Night basé lui sur l’exploration. Sonia Belmont devait y faire son retour après le décevant Legends sur Game Boy en partageant l’affiche avec un certain Victor Belmont, son descendant du XIXème siècle, aspiré par un portail spatio-temporel en 1666 pour faire face à son destin de chasseur de vampires et affronter Dracula ! C’est un personnage connu sous le seul nom de la Comtesse qui – aidée par la Mort – est responsable de ce paradoxe réunissant deux Belmont à la même époque dans le but de ramener le Prince des Ténèbres dans le monde des vivants. Ceci dit, nul ne sait si les héros devaient vivre chacun l’aventure en parallèle sans jamais se rencontrer (comme Reinhardt Schneider et Carrie Fernandez dans Castlevania sur Nintendo 64 par exemple), ou si la progression de l’un pouvait avoir une conséquence sur celle de l’autre…
Les animations postmortem de ce qui devaient être à-priori l’ouverture du jeu et les introductions respectives des héros (regroupées dans la vidéo ci-dessous) amènent à penser que le sous-titre du jeu ne concerne pas la résurrection de Dracula mais bien celle de Sonia, ramenée à la vie soit par les pouvoirs de la Comtesse en même temps que la réapparition de Castlevania, soit par une mystérieuse puissance divine désireuse de rééquilibrer les forces du Bien et du Mal alors que le Prince des Ténèbres n’est pas supposé revenir dans le monde des humains avant quelques décennies (en 1691 exactement en suivant la chronologie officielle). L’arrivée soudaine de Victor en 1666 devant le château transylvanien alors qu’il jouait aux cartes à son époque reste beaucoup plus mystérieuse quant à elle ; pourquoi un Belmont qui a refusé d’embrasser son destin de chasseur de vampires (selon ce que l’on sait de son background) est-il choisi pour affronter Dracula et/ou la Comtesse aux côtés de son ancêtre au lieu d’un autre membre de son illustre famille plus expérimenté et/ou volontaire que lui ? Peut-être bien que la rupture du continuum espace-temps provoquée par les agissements de la Comtesse devait également bouleverser la vie que s’était choisie Victor Belmont pour le ramener dans le droit chemin, qui sait ?
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Les probables introductions du jeu et des héros
Le magazine américain Next-Gen dans son N°1 de septembre 1999 (p. 18 à 20) précise la teneur du titre en rapportant les propos de Norio Takemoto (lequel a participé aux graphismes de The New Generation sur Megadrive auparavant) qui était en réalité le chef de projet du jeu ! Il révèle qu’il était à la tête d’une petite équipe de quatre programmeurs et de sept artistes / designers dans la filiale américaine de Konami. Il parle de Resurrection comme d’un jeu d’action linéaire en 3D composé de cinq niveaux eux-mêmes subdivisés en plusieurs zones (jusqu’à dix) de tailles variables. Le nombre d’ennemis différents devait s’élever à une quarantaine, et ce bestiaire semblait plutôt classique (chauve-souris, squelettes, goules, fantômes danseurs, hommes-poissons, armures enchantées, loups-garous, etc.) tout comme les bosses (Médusa, momie, hydre) comme en témoignent les divers screenshots diffusés depuis l’annulation du titre ; quant aux environnements, ils semblaient rendre honneur au château qu’on connaît si bien. Par ailleurs, il était prévu que les héros utilisent un fouet en arme principale (Belmont oblige !) et disposent de six armes secondaires différentes (hache, croix-boomerang, eau bénite, dague, etc.), chacune étant dotée d’un item crash désormais habituel dans la licence. Quelques mouvements spéciaux s’ajoutaient à la palette du joueur comme une roulade avant ou un saut arrière bien utiles pour se sortir d’un mauvais pas.
La caméra devait disposer de trois modes : un premier qui suit le héros de dos, une autre qui se focalise sur les ennemis grâce à un système de lock, et un dernier complètement libre. Si le gameplay était très classique, c’est du côté de la technique que Norio Takemoto souhaitait accoucher d’un titre irréprochable pour l’époque ; aussi Resurrection devait tourner à 30 images par seconde avec des personnages modélisés entre 500 et 900 polygones pour les ennemis et jusqu’à 1000 polygones pour les protagonistes, faisant ainsi honneur aux capacités de la Dreamcast, tout en gardant en tête qu’on ne sait pas exactement où le développement du titre en était à son annulation. En outre, l’OST se voulait accentuer l’ambiance gothique du jeu en mêlant des éléments modernes comme des beats techno à du chant Grégorien ! Une partie des pistes a été rendue publique à partir d’un CD offert à la presse mais sans que la musique ne soit clairement créditée (certaines sources évoquent un certain Mark Lindsey comme étant le compositeur le plus probable).
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Une bien courte démo !
A la lumière de ces éléments, il apparaît clair que l’équipe américaine ne réinventait pas la licence (ce qui n’était pas son objectif de toute façon), Resurrection semblait être une nouvelle tentative de percer sur le terrain de la 3D après des épisodes sur Nintendo 64 ayant peu convaincus le public en la matière. Scénaristiquement parlant, l’idée de réunir deux Belmont de deux époques différentes semblait séduisante et aurait pu créer un véritable lien dans la lignée de chasseurs de vampires, sans oublier que la sortie effective du titre aurait probablement réhabilité l’existence de Sonia, laquelle fût reniée de la chronologie officielle par le producteur Koji Igarashi en 2001 pour y installer Leon Belmont en aïeul de la famille. Au final, Castlevania : Resurrection est un acte clairement manqué pour la série, un épisode qui aurait très bien pu apporter une nouvelle sensibilité plus occidentale sur la notion de Destin dans la licence par exemple (précédant la trilogie Lords of Shadow du studio hispanique MercurySteam de presque dix ans) et réconcilier les fans avec la 3D avant qu’IGA une fois aux commandes de la saga ne décide de se concentrer sur le genre « Metroidvania » initié par Symphony of the Night car ses tentatives en 3D ne seront elles non plus pas aussi réussies qu’espéré… Mais ce n’est là évidemment que pure spéculation !