Ami d’enfance et rival de Juste Belmont, Maxim Kischine est un puissant bretteur – porteur de l’épée Stellaire (ou Stellar Sword) et d’un shuriken-boomerang géant en guise d’arme secondaire – à l’agilité d’un ninja qui apparait uniquement dans Castlevania : Harmony of Dissonance sur Game Boy Advance. La notice indique que ce personnage est parti en voyage de formation deux années avant le début de l’épisode, c’est-à-dire peu de temps après que Juste soit devenu le chasseur de vampires en titre et ait obtenu le fouet Vampire Killer.
L’introduction du jeu raconte que Maxim est revenu blessé et amnésique de son périple en annonçant au héros que leur amie d’enfance Lydie Erlanger a été enlevée ! Il n’en faut pas davantage pour que les deux jeunes hommes partent à la recherche de celle à laquelle ils tiennent autant l’un que l’autre. Maxim n’a que de vagues souvenirs de l’enlèvement et croit se rappeler de l’endroit où la jeune femme est retenue, ce qui amène les rivaux jusqu’à un mystérieux château qu’ils imaginent volontiers être Castlevania…
Trop affaibli une fois les grilles franchies, Maxim laisse Juste commencer l’exploration des lieux seul pour reprendre des forces. Les deux hommes se retrouveront plus tard au sanctuaire des apostats (Shrine of the Apostates) où la mémoire semble peu à peu revenir au bretteur mais alors que le chasseur de vampires en titre souhaite poursuivre l’aventure à deux, son ami refuse net, prétextant qu’ils parcourront davantage de surface du château s’ils sont séparés de sorte à retrouver Lydie au plus vite. Juste croisera à nouveau la route de Maxim dans la grotte aux squelettes (Skeleton Cave) mais ce dernier ne semble pas dans son état normal, allant jusqu’à faire preuve d’hostilité à l’égard de son meilleur ami qu’il accuse d’être l’un des ravisseurs de Lydie et lui promet de pourrir dans les murs du château avant de s’enfuir dans un éclat de rire ! Le héros n’aura guère le temps de réagir et poursuivra sa route en s’interrogeant sur le comportement étrange de Maxim.
C’est à la passerelle céleste (Sky Walkway) que les deux hommes se rencontrent une nouvelle fois mais Juste y retrouve l’ami qu’il connaît. La mémoire lui revenant peu à peu, Maxim explique les raisons de son voyage deux années auparavant ; quand Juste obtint le titre de chasseur de vampires et le fouet Vampire Killer, son rival confesse que ce fut comme si un mur s’était érigé entre eux, c’est pourquoi celui-ci décida de partir en expédition afin de surpasser l’élu et de le soulager de son Destin. Maxim raconte qu’il pensait qu’en retrouvant et détruisant les reliques de Dracula – comme Simon Belmont l’avait fait un demi siècle auparavant dans Simon’s Quest sur NES – ses souhaits seraient exaucés… Il précise qu’il se sentit comme aidé dans sa quête par un être supérieur alors qu’il doutait sur ses chances de succès mais que c’est le trou noir depuis qu’il a atteint son objectif, excepté la disparition de Lydie dont il a bien conscience. Juste pense alors que c’est probablement la réunion des reliques de Dracula qui provoqua l’apparition du château… Les deux amis se séparent à nouveau, bien décidés à retrouver la jeune femme coûte que coûte.
C’est la Mort qui explique le pot-aux-roses au héros (et au joueur par la même occasion) devant le portail de téléportation de la tour de l’horloge (Clock Tower) : il existe en réalité deux bâtisses parallèles (dénommées A et B dans le jeu) formées par la volonté de Maxim qui s’est scindée en deux esprits quand il eût en sa possession toutes les reliques de Dracula, l’un gardant sa personnalité d’origine et l’autre nourrissant des desseins maléfiques ! Juste retrouve ainsi à la passerelle céleste du château B la mauvaise incarnation du bretteur qui lui explique sa nature et confesse être le ravisseur de Lydie mais que l’amnésie de son double l’empêche pour le moment de retrouver la trace de la jeune femme… Hélas, les deux esprits étant quoiqu’il arrive liés, le sort de l’un affecte l’autre, c’est pourquoi Juste ne peut se résoudre à en finir avec la mauvaise incarnation de son ami et le laisse s’enfuir…
De retour à la passerelle céleste du château A, le héros retrouve le bon Maxim qui a pris conscience de l’existence de son autre lui ainsi que de la localisation de la cachette de Lydie. Le bretteur offre son bracelet au chasseur de vampires – sésame de la salle du trône où se trouve la jeune femme – afin que ce dernier puisse sauver leur amie d’enfance de la menace qui pèse sur elle. En effet, son sang est nécessaire pour la fusion des deux châteaux vers le Mal, provoquant ainsi la suprématie du double démoniaque et la mort du Maxim originel ! Hélas, les retrouvailles sont de courte durée entre Juste et Lydie quand la Mort surgit pour s’emparer de la jeune femme qu’il confiera au double maléfique…
C’est au centre du château que le héros finira par retrouver ses deux amis mais leur sort (et l’issue du jeu) dépend de plusieurs conditions : le lieu de la rencontre (château A ou B), l’acquisition des six reliques de Dracula, et le port des deux bracelets d’amitié (celui de Juste et celui de Maxim) pendant l’affrontement inévitable entre les deux rivaux. Dans le pire des cas, Juste arrive trop tard pour sauver Lydie déjà sacrifiée et se voit contraint de se débarrasser de son ami totalement englouti par les forces démoniaques pour au moins détruire Castlevania et contenir les ténèbres pouvant ramener Dracula dans le monde des humains. Une autre possibilité consiste à ne pouvoir secourir que la jeune femme, Maxim finissant par succomber au pouvoir des reliques avec pour maigre consolation de périr sous les coups de son ami d’enfance. Enfin, la force de l’amitié, la possession des reliques et la victoire du héros permettent au bretteur de résister aux ténèbres, provoquant l’apparition du spectre de Dracula (un être monstrueux né des six reliques) que le chasseur de vampires en titre finira par éliminer, accomplissant ainsi son Destin…
On notera à travers les propos des deux esprits de Maxim qu’ils considèrent la force des Belmont (et par là-même le rôle de chasseur de vampires) comme une malédiction que Juste et sa famille doivent porter davantage tel un fardeau que tel un honneur ou un don, au même titre que le pouvoir des ténèbres qui serait le seul à en supporter la comparaison et ainsi la valeur. En d’autres termes, l’unique Destin des héritiers du Vampire Killer serait de chasser Dracula hors de ce monde éternellement et sans répit, le seul repos n’étant possible qu’avec la mort du porteur du fouet familial, arme iconique alors transmise à la génération suivante pour perpétuer le cycle… Cette ambivalence entre le Bien et le Mal dans une lutte séculaire est un thème déjà maintes fois développé dans la licence (principalement dans le diptyque Rondo of Blood sur PC-Engine / Symphony of the Night sur Playstation et Saturn) mais il faut bien reconnaître que c’est davantage le poids du sang des Belmont et le sacerdoce qu’il incombe inéluctablement qui semble mis en avant à travers les propos de Maxim dans Harmony of Dissonance. En d’autres termes, Juste ne peut échapper à son sort de sauveur de l’humanité jusqu’à sa mort selon son ami qui souhaiterait l’en décharger alors que le héros ne remet en question à aucun moment son rôle à jouer dans l’Histoire ; ironiquement, c’est même l’altruisme de Maxim qui met en action les forces du Destin !
Par ailleurs, la schizophrénie du bretteur révèle bien toute la complexe dualité de l’esprit humain, autant soumis au Bien qu’au Mal ; le bon Maxim était pétri de bonnes intentions en désirant soulager son ami de son Destin mais il a été corrompu par les ténèbres, un peu comme Hugh Baldwin dans Circle of the Moon sur Game Boy Advance qui lui refusait de ne pas avoir été choisi comme chasseur de vampires en titre par son père Morris. En fait, ce personnage secondaire de Harmony of Dissonance en devient plus intéressant que le héros du jeu lui-même en devenant l’incarnation même du combat (pour ne pas dire supplice ici) entre le Bien et le Mal ! Si cette lutte intérieure à travers un personnage rappelle évidemment Alucard (dont la nature bâtarde est la source de ses tourments), elle se matérialisera en outre (mais traitée différemment) dans l’épisode GBA suivant, à savoir Aria of Sorrow, à travers son protagoniste Soma Cruz, ou encore dans la trilogie Lords of Shadow grâce à Gabriel Belmont.
En définitive, si Maxim Kischine a vite des allures du Richter Belmont corrompu de Symphony of the Night en raison d’un chara–design assez proche et d’un destin plutôt similaire, il s’en distingue tout simplement par ses motivations à l’origine ; c’est en cherchant à libérer son ami de sa mission quasi-divine d’élu de la Lumière alors qu’il aurait très bien pu demeurer un simple allié de confiance mais sans grande envergure qu’il se heurte à la marche du Destin (voire de la fatalité) et devient l’objet de forces qui le dépassent, une sorte de marionnette facilement manipulable que seule l’intervention providentielle du véritable et unique chasseur de vampires en titre pourra extraire de ce mauvais pas, contrairement à Richter qui se laissera duper par pur orgueil et obligera en quelque sorte Alucard à intervenir pour rétablir le cours de l’Histoire ; ce dernier fait d’ailleurs presque office de Deus Ex Machina d’une certaine manière en s’appropriant malgré lui le rôle de héros sauveur de l’humanité abandonné par Richter (ce qui provoquera la chute de la maison Belmont dans la suite de la chronologie officielle), là où Juste ne fait qu’accomplir son sacerdoce familial, ni plus ni moins.
Ainsi, Maxim Kischine fait parti de ses personnages secondaires diablement intéressants dans la mythologie de la licence car il réussit l’exploit d’avoir davantage de charisme en tant que sidekick que le protagoniste du jeu lui-même, pertinence qu’il perdra sans autre forme de procès dans le mode post-game à son prénom dans lequel il devient jouable mais en perdant hélas tout son relief (il n’y a aucune once de scénario ici, le bretteur devant simplement explorer le château et vaincre tous les bosses pour atteindre le spectre de Dracula), peut-être d’ailleurs car il ne peut pas y affronter son double…